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MICROCREDIT – Le potentiel énorme de certaines innovations comme Zopa, Prosper, et Kiva semble modifier profondément les méthodes de collecte de fonds de prêts, et démontre que les banques ne sont pas à la hauteur de leurs taches.
Ce mécanisme financier conçu pour les pays pauvres pourrait-il ce servir de telles innovations pour son adaptation en France ? Ceci pourrait être le cas si les banques françaises ignorent les principes pour le Crédit Responsable. L’article de Libération ci-dessous montre avec l’exemple Kiva que le pionnier du crédit personnel et philanthropique en ligne est en train de décoller. L'idée de lien direct via le Net parait plaire. A travers ces organismes de microcrédit, intermédiaires locaux, les riches des pays développés peuvent prêter aux pauvres des économies en retard et aux entrepreneurs particuliers exclus du système bancaire dans leurs pays. Peuvent les banques tenir concurrence à les microdons et les bonnes actions ?

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MICROCREDIT SUR LE NET : QUAND DENNIS PRETE A BORIS

GRACE A KIVA.ORG, DES PRETEURS OCCIDENTAUX PEUVENT, A PARTIR DE VINGT-CINQ DOLLARS, AIDER DES ENTREPRENEURS DES PAYS PAUVRES A ACHETER LEUR TAXI, MONTER LEUR SALON DE COIFFURE OU ACHETER UN REFRIGERATEUR POUR LEUR EPICERIE...
(Par Judith RUEFF, Libération, QUOTIDIEN : jeudi 4 janvier 2007)


Boris Jordanov pose devant son épicerie. La cinquantaine, un peu raide dans son blouson de jean. La vitrine est recouverte d'affiches en couleurs. A côté de la photo, quelques lignes résument sa situation. Il habite Vratza, petite ville de Bulgarie, a travaillé à l'usine pendant vingt-cinq ans. Licencié, il a monté un commerce. Il lui fallait 2 000 dollars supplémentaires pour acheter réfrigérateurs et climatiseur. Il vient de trouver des gens pour lui prêter cette somme. Des gens ? Par exemple : Kristin, retraitée d'Alaska, Dennis, photographe californien, Dinah, blogueuse et Tom, ingénieur anglais. Parmi bien d'autres, puisqu'ils sont 53 à avoir financé le projet de Boris Jordanov, en prêtant chacun au moins 25 dollars. L'épicier bulgare ne connaît personnellement aucun d'eux. Mais il les remboursera tous. Bienvenue sur Kiva.org, le site qui met le microcrédit à la portée du premier internaute venu.

Il suffit d'un accès à la grande Toile mondiale et d'un minimum de cash pour aider à changer un peu la face du capitalisme. Première étape : connectez-vous sur www.kiva.org. Pour «prêter à un entrepreneur particulier dans un pays en développement et lui donner les moyens de se sortir de la pauvreté», comme l'indique la page d'accueil, cliquez, et ils défilent. Marchande de glaces en Equateur, conducteur de moto au Cambodge, éleveur de bétail en Ouganda, boucher en Moldavie, paysan au Kenya ou vendeuse de vêtements au Honduras, ils sont des dizaines. Hommes et femmes, tous entrepreneurs à la recherche de fonds, tous exclus du système bancaire. Trop petits. Ne rapportent pas assez. Vous avez 25 dollars à miser sur un de ces microbusiness ? Cliquez dessus, payez en ligne et attendez qu'il vous rembourse. Cela prendra environ un an, mais les risques sont presque nuls : les organismes de microcrédit affichent des taux de remboursement de 98 % en moyenne, et Kiva peut se vanter d'avoir atteint les 100 %.

Kristin, super-«grandma» de 60 ans, a sauté sur son ordinateur dès qu'elle a entendu parler du site, fin octobre. Elle vit en Alaska et s'apprête à partir deux ans comme volontaire dans l'ONG américaine Peace Corps, en Roumanie. Alors, elle a choisi de dépanner un épicier bulgare, une coiffeuse, bulgare elle aussi, un salon de beauté moldave, etc. Sept prêts en tout, tous en Europe de l'Est : «J'aurai peut-être une occasion d'aller les voir, ce n'est pas très loin de la Roumanie... J'irai me faire coiffer, juste pour voir, raconte-elle. J'avais vendu des livres sur eBay et il me restait 100 dollars sur mon compte Paypal, mais finalement, j'ai mis plus. Regarder les projets, voir le visage des gens, vous vous sentez connectés. Ça rend presque un peu accro. J'avais donné 25 dollars à un boucher moldave auquel il manquait un peu pour boucler son affaire, alors j'ai rajouté un peu d'argent.» A l'arrivée, 250 dollars. Pour Kristin, ces microdons sont une bonne action, elle n'attend pas le retour de son argent. Elle aime l'idée que son aide aille directement à ceux qui en ont besoin : «Quand vous donnez pour les victimes du tsunami ou de Katrina, 10 % de l'argent arrive dans leurs poches ! Avec Kiva, 100 % vont au projet.»

COMPETENCES ET INVENTIVITE

Le site est une révolution : il ouvre l'internet communautaire le Web2.0 dans le jargon des initiés à la microfinance. MySpace et eBay mettaient en relation virtuelle des gens du même monde. Désormais, avec Kiva, les riches des pays développés peuvent prêter, sans intérêts, aux pauvres des économies en retard. Depuis le lancement en mars 2005, la nouvelle gravite dans la sphère numérique, sautant de mail en blog. Dennis, Californien d'origine philippine, a découvert le site «par une amie». Enfin, il ne la connaît «que par l'Internet», mais elle l'a convaincu de prêter à Boris. Elle s'appelle Dinah et, sur son blog, cette fana du Web fait la promo du microprêt en ligne. Post du 17 décembre : elle vient de faire son «troisième prêt de 25 dollars» en un mois (à Boris Jordanov) et appelle ses lecteurs à suivre son exemple. Tom, ingénieur britannique, a un peu d'avance. Il a financé 89 projets dont les frigos et la clim de l'épicier bulgare , depuis son inscription il y a un an. Une douzaine d'emprunteurs ont déjà fini de le rembourser. «Quand l'argent reviendra, je le prêterai ailleurs», promet Dennis. Parce que «si on ne peut pas régler l'inégalité de la richesse dans le monde, on peut au moins aider ceux qui n'ont même pas le minimum pour vivre».

Tout cela semble trop beau pour être vrai, mais, derrière l'écran, la mécanique fonctionne grâce un cocktail d'enthousiasme, de compétences et d'inventivité. Dans «The Kiva Story», telle que les fondateurs la racontent sur le site, un couple tient le rôle principal : Matt et Jessica Flannery, partis de San Francisco au printemps 2004 pour travailler dans les campagnes d'Afrique de l'Est. De leur périple, ils ramènent une certitude : les Africains ont le sens du business, ils savent gérer une entreprise, mais ils n'ont pas accès aux capitaux. Et une question : comment faire pour prêter directement de l'argent à un petit entrepreneur d'un village africain ? Comme il n'y a pas de réponse, ils décident de l'inventer. Premal Shah, un ex du système de paiement en ligne Paypal, les rejoint. Début 2005, en collaboration avec une ONG locale, ils lancent un projet pilote (sept prêts) en Ouganda. Succès immédiat de Kiva («accord», en swahili), même si les premiers prêteurs-cobayes sont des amis. Sur le terrain, le partenaire ougandais du site gère les microcrédits au jour le jour et envoie régulièrement des nouvelles des entrepreneurs.

RAZ-DE-MAREE DE BONNES VOLONTES

Car rien ne serait possible sans ces indispensables intermédiaires locaux. Ces organismes de microcrédit sélectionnent et proposent les chefs d'entreprise, vérifient la solidité des projets, versent l'argent récolté, assurent le suivi et encaissent les remboursements mensuels augmentés d'un faible taux d'intérêt couvrant les frais de fonctionnement. Une fois le prêt complètement soldé, ils renvoient les sommes à Kiva, qui rembourse les débiteurs. Et la boucle solidaro-financière est bouclée. Georgi Breskovsky dirige Mikrofund, une microbanque basée à Sofia qui compte onze agences en Bulgarie. Grâce à l'argent de la fondation Soros, il a distribué cinq mille microprêts depuis 1999. Pour celui de Boris Jordanov et d'une centaine d'autres, il a utilisé le relais de Kiva. «C'est un nouveau moyen, plus simple et plus rapide, de trouver des fonds, explique-t-il, alors que l'accès au crédit est encore très difficile, en particulier dans les campagnes. Ceux qui ont besoin d'emprunter y passent beaucoup de temps et d'énergie, et pour ceux qui s'adressent à une banque, les taux peuvent aller jusqu'à 25 %.» Mikrofund prête à 10 % seulement, de quoi couvrir ses frais de fonctionnement.

Lou Bowell, consultant pour des compagnies d'assurances à Tucson, Arizona, est un «croyant convaincu». Mais participer au financement d'un projet sur Kiva, ce n'est pas, dit-il, de la charité chrétienne. «Quand vous mettez de l'argent, vous savez que ces gens ne sont pas en train de jouer, ils vous le rendront parce que leur action engage leur communauté. Mais la vraie question, ce n'est pas de récupérer sa mise, mais de savoir s'ils ont réussi.» Lou a prêté à une quinzaine de micro-entrepreneurs, surtout des femmes «elles ont davantage le sens des responsabilités» , surtout en Afrique, «je me sens concerné, en tant que Noir». Au Sénégal, Kiva travaille avec SEM (Sénégal Ecovillage Microfinance), une ONG qui finance des prêts coopératifs à 7 % par an (contre 7 % par mois à la banque). Pour acheter des semences ou des tissus à vendre sur les marchés, un groupe de villageois emprunte ensemble. Cela réduit les risques et permet de faire tourner l'argent. Avec 25 dollars chacun, des paysans du village sahélien de Louly Ngogom ont pu ainsi couvrir leurs besoins en semences, éviter les mois difficiles et envoyer les enfants à l'école. «En quelques mois, nous sommes passés d'une poignée de prêts à une trentaine, grâce à l'afflux de fonds, se réjouit Ismaël Diallo, responsable du microcrédit. Le problème, c'est que les sommes sont petites quand il faut partager à plusieurs, et que nous ne couvrons pas nos frais de fonctionnement.»

Le pionnier du crédit personnel et philanthropique en ligne est en train de décoller. Le 31 octobre dernier, la chaîne de télévision culturelle américaine PBS raconte l'histoire d'une Ougandaise qui a acheté sa machine à fabriquer du beurre d'arachide grâce à la multitude de gens qui ont prêté quelques dizaines de dollars via Kiva. Trente-cinq minutes plus tard, le site est bloqué pendant deux jours, incapable de faire face à un raz-de-marée de bonnes volontés. Depuis, le nombre d'utilisateurs est passé de 6 000 à 12 000, et le cap d'un million de dollars récoltés a été dépassé en décembre. La start-up est désormais à l'équilibre. Selon Matt Flannery, qui tient ses «Chroniques de Kiva» (http://kivachronicles.blogspot.com) sur le Web, environ 20 000 dollars arrivent chaque jour pour les crédits, plus 10 % de dons pour le fonctionnement du site. «Ce qui veut dire que nous sommes libres de choisir notre destinée et de construire le produit que nous désirons tous, note «l'entrepreneur social» sur son blog. Je ne peux vous dire à quel point cela m'enthousiasme.»

Facile à utiliser et efficace, le site va devoir maintenant gérer la croissance, ce qui implique d'étendre son réseau (qui couvre une vingtaine de pays aujourd'hui) et de trouver de nouveaux partenaires. Car l'idée de lien direct via le Net séduit. Bruno, chef opérateur français, a appris l'existence de Kiva alors qu'il travaillait à New York. Il a commencé à regarder les projets, se demande à quelle micro-entreprise il va prêter, lui qui a «la chance de bien gagner [sa] vie dans un pays riche». «J'aime bien l'idée de la chaîne entre les gens , dit-il, tu prêtes à quelqu'un qui a un projet, si ça marche, cette personne va pouvoir en aider d'autres, qui sans ça se retrouvent à faire le ménage sans papiers en France ou ailleurs...» Chiche ?

ID: 39271
Author(s): iff
Publication date: 04/01/07
   
URL(s):

L'enquête parue dans Libération sur Kiva
 

Created: 04/01/07. Last changed: 04/01/07.
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